Qu'ont en commun Aurélie Filippetti, Manuel Valls, Cécile Duflot, Marylise Lebranchu, Bernard Cazeneuve, Vincent Peillon ou Fleur Pellerin?
Ils ont alloué l'an dernier à leurs équipes des primes plus élevées que celles accordées par Jean-Marc Ayrault à sa propre garde rapprochée à Matignon.
Parmi les 565 membres des cabinets du gouvernement Ayrault déclarés au 1er août 2013, 449 très précisément se sont répartis l'an dernier plus de 12 millions d'euros de «primes de cabinet», des rémunérations aujourd'hui officialisées, mais sur lesquelles continue de régner une certaine opacité.
Les ministres les plus généreux ont distribué par collaborateur plus de 3500 euros mensuels (soit 42.000 euros par an) de revenus bruts complémentaires.
Plus de deux smics par mois, en somme.
En plus du salaire donc. Et il ne s'agit là que d'une moyenne.
Le premier ministre, pour sa part, consentait un peu plus de 2700 euros par mois et par personne en moyenne (soit 33.000 euros par an).
C'est ce que révèlent les 100 pages de tableaux du dernier «jaune budgétaire» annexé au projet de loi de finances 2014 sur les «personnels affectés dans les cabinets ministériels».
Un document aride et visiblement négligé, que Le Figaro a décortiqué pour tenter de comprendre qui a touché combien en gratifications l'an dernier.
À l'heure où le nouveau chef du gouvernement, Manuel Valls, dit vouloir traquer l'embonpoint dans les budgets de l'État, notre palmarès des primes ministérielles témoigne que la République sait, pour le moins, récompenser ses serviteurs.
Pour éviter toute confusion, nous avons pris le parti de ne détailler que les indemnités des équipes politiques qui composent les ministères.
Nous avons volontairement écarté les personnels de cabinet chargés des «fonctions de support», tels les gardes du corps, chauffeurs, secrétaires, cuisiniers, serveurs, maîtres d'hôtel, femmes de chambre, qui représentent environ 2500 personnes, et dont les primes oscillent individuellement entre 200 et 500 euros par mois.
Pour compenser les servitudes de la fonction
«Indemnité pour sujétions particulières» (ISP). C'est sous ce vocable pudique que l'administration qualifie les enveloppes qui se distribuaient autrefois de la main à la main et que Lionel Jospin, dès 2001, a souhaité intégrer dans les fiches de paie des collaborateurs de ministres.
Ces bonus sont accordés en principe pour compenser les servitudes de la fonction.
Avec 42.000 euros de complément de revenu annuel par personne, c'est donc à la Décentralisation, chez Anne-Marie Escoffier, pourtant simple ministre déléguée, que les membres de cabinet étaient les mieux lotis en 2013.
Une situation enviable qu'ils partageaient avec l'écurie Filippetti, qui arrive en deuxième place, à équivalence de primes.
Un «fromage» la Culture? Le ministère qui défend bec et ongles les intermittents du spectacle ne s'est pas oublié.
La médaille de bronze échoit au cabinet de la discrète Sylvia Pinel, qui officiait au ministère de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme, versant 40.000 euros de primes annuelles en moyenne à huit des treize collaborateurs déclarés dans les documents budgétaires.
Surprise: l'équipe de Nicole Bricq, cette ministre du Commerce qui fit polémique en clouant au pilori la cuisine de l'Élysée lors de la récente visite du président chinois à Paris, entre dans le «top 10» des ministères où l'on était mieux traité qu'à Matignon.
Sa garde rapprochée a perçu en 2013 plus de 34.000 euros brut de prime par personne. «Pas si “dégueulasse” que ça la cuisine ministérielle», ironise un préfet qui a bien connu cette oubliée du nouveau gouvernement.
Christiane Taubira, Laurent Fabius, Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Marisol Touraine, Jean-Yves Le Drian, Najat Vallaud-Belkacem ou Stéphane Le Foll ont su, pour leur part, selon un haut fonctionnaire de Bercy, «rester dans les clous», ne lâchant guère plus de 2200 euros de primes par mois à leurs troupes en moyenne.
Les ministres les moins généreux ou les moins bien dotés étaient aux Anciens combattants ou aux Personnes handicapées, avec 1000 euros mensuels par collaborateur.
Et c'est Michel Sapin qui ferme le bal, avec une modeste rallonge de 670 euros brut mensuels pour les siens, quand il sévissait au ministère du Travail.
À croire que sa propension à tenir serrés les cordons de la bourse le prédisposait à occuper sous Valls les Finances et les Comptes publics.
voilà la bonne crise qui se porte à merveille !
Un petit rajout croustillant
Primes : Valls dispose de la plus grosse enveloppe !
Selon les documents budgétaires, le ministère de l'Intérieur est le mieux loti en primes de cabinet.
Les proches du ministre toucheraient en moyenne 20.000 euros par an de complément de salaire.
«Indemnité de sujétions particulières» (ISP).
Ce vocable châtié désigne en volapük administratif les primes officiellement versées sur la fiche de paie de certains collaborateurs dans les cabinets ministériels.
Ce système a été mis en place dès 2002, sous Jospin, pour mettre un terme à la distribution de primes via les fonds secrets, en liquide et non déclarées.
Ces primes viennent en complément des traitements et revenus que touchent déjà leurs heureux bénéficiaires.
Et le gouvernement a su se montrer généreux.
En tête du hit-parade des ministres les mieux lotis: Manuel Valls, à l'Intérieur, avec une «dotation annuelle autorisée» de 1.547.452 euros pour l'année 2012.
Ce qui place Beauvau juste derrière Matignon, en termes d'enveloppe globale.
Tout figure noir sur blanc dans une précieuse annexe du projet de loi de finances sur les «personnels affectés dans les cabinets ministériels».